L'Europe soutient les ambitions de Dunkerque

Tourisme
Mardi 16 mai 2017

La digue de Malo, à Dunkerque.




Des fonds européens pour venir en aide aux professionnels du tourisme, c’est l’objectif du projet Tendances, qui vient d’être officiellement lancé à Dunkerque. Les restaurateurs et hôteliers pourront bientôt bénéficier de conseils de professionnels pour améliorer leurs services et mieux répondre aux attentes de leur clientèle.

« Pour créer des emplois à Dunkerque, il n’y a pas que l’industrie. Ici, nous misons aussi beaucoup sur le tourisme. Une véritable stratégie comportant de lourds investissements publics – comme la requalification des espaces balnéaires – est mise en place pour y parvenir. Le projet européen Tendances, lui, va permettre à nos restaurateurs et à nos hôteliers de se mettre à la page », résume Franck Dhersin, vice-président au Tourisme à la communauté urbaine de Dunkerque.

L'importance d'un regard extérieur

Guillaume Debrabant
Guillaume Debrabant

Se mettre à la page, c’est exactement ce que souhaite Guillaume Debrabant, restaurateur sur la digue depuis seize ans : « Quand on reprend un établissement ou qu’on en tient un depuis longtemps, comme moi, c’est très intéressant de bénéficier du regard d’une personne extérieure pour connaître les nouvelles tendances de consommation. J’avais le projet de relooker entièrement mon restaurant début 2018. J’aimerais bénéficier des conseils d’un architecte d’intérieur pour savoir si ce que je pense faire est adapté, si les matériaux que j’ai choisis seront encore à la mode dans quelques années… Je pourrais ainsi investir autant que prévu dans mon projet mais sans doute avec de plus beaux matériaux ».

Définir les attentes des clientèles cibles

« Peu de territoires ont lancé ce type de démarche », détaille Pascale Montefiore aux manettes de Tendances pour l’agence d’urbanisme de Dunkerque. « Pour élaborer le projet tendances selon nos besoins, nous nous sommes  inspirés de deux démarches "Esprit de Picardie" et "Autour du Louvre-Lens". Nous avons également pioché de bonnes idées chez nos voisins belges. »


Tendances comporte deux volets. Le premier consiste à définir les attentes des clientèles cibles du territoire dunkerquois, notamment les habitants de la métropole lilloise et de Belgique. « Des études, des enquêtes comparatives, des ateliers créatifs avec des habitants et des touristes sont actuellement menés dans ce but… »

Carnets d'inspirations

Résultat concret de ce travail, un premier carnet d’inspirations (à découvrir ci-dessous), consacré aux aménagements des espaces publics, est paru. Il recense différents exemples de réhabilitations réussies de digues de mer, ailleurs en France et à l’étranger.

Le prochain carnet, en cours de conception, s’adressera aux propriétaires de cafés, d’hôtels et de restaurants : il sera essentiellement question de style et d’ambiance avec également quelques pistes relatives à l’accueil des clientèles. Un autre carnet sera, lui, consacré aux menus, avec une partie consacrée à l’utilisation des produits locaux qui font l’identité de notre territoire…

Pas question en effet de se contenter de copier des modèles dans l’air du temps : ce qui fait la force d’un lieu, ce sont ses spécificités. « Les carnets d’inspirations proposent des exemples adaptés à nos caractéristiques locales : des terrasses abritées du vent, des plaids pour se réchauffer l’hiver, des cartes en néerlandais et en anglais… »

Séances de coaching personnalisées


Stéphane Buyens

Le deuxième volet de Tendances consiste à apporter une aide concrète aux professionnels de l’agglomération dunkerquoise dans des domaines extrêmement variés, comme l’agencement et la décoration des établissements qui seront confiés à des designers et des architectes d’intérieur.

Dans le domaine de la gastronomie, le chef étoilé Stéphane Buyens, originaire de Belgique, et d’autres chefs de renom dispenseront  leurs conseils aux restaurateurs dunkerquois lors d’ateliers créatifs. L’objectif  principal consiste à élaborer des recettes plus saines, qui privilégient l’utilisation de produits locaux. Des séances de coaching personnalisées permettront aussi de voir ce qui fonctionne ou pas dans un établissement et surtout d’identifier les pistes d’amélioration pour renforcer leur attractivité.

140 000 euros pour 50 professionnels

Des rencontres avec des agriculteurs locaux seront également organisées : proposer une carte où figurent des produits frais, de saison et estampillés made in Dunkerque est de nature à séduire les touristes. La formation sera aussi au cœur du dispositif : parler quelques mots d’anglais et de néerlandais, avoir le sens de l’accueil, cela s’apprend aussi ! 

« Nous disposons d’un budget de 140 000 euros, dont 50% de subventions européennes pour financer ces actions. Au total, une cinquantaine de professionnels devraient donc pouvoir bénéficier de ce dispositif », indique Pascale Montefiore.

Coachés, ils témoignent

« Des produits frais, rien de congelé »

Francky Baert
Francky Baert

Francky Baert, restaurateur à La Panne en Belgique, a été coaché en matière de cuisine : « Avec six autres chefs, nous avons suivi des ateliers de cuisine pour être plus créatifs et savoir utiliser les produits locaux. Puis un coach est venu dans mon restaurant pour me prodiguer des conseils personnalisés. Nous proposions uniquement des desserts, nous servons désormais de vrais repas complets. Rien de congelé, uniquement des produits frais. C’est beaucoup plus agréable de travailler de cette façon. Nous avons aussi arrêté de servir juste des cafés, cela prenait trop de temps et cela ne nous rapportait presque rien. Je sais désormais quelle clientèle je cible et cela fonctionne très bien ! »

« Fixer le juste prix et soigner les détails »


Ingrid Duporge

Ingrid Duporge tient un camping à Port-le-Grand, dans la Somme : « J’ai vraiment appris à comprendre les attentes de mes clients. On pense toujours bien faire mais grâce au regard extérieur du professionnel qui m’a coachée, on découvre que non ! J’ai donc revu beaucoup de choses : j’ai par exemple mis des bouilloires et des sachets de thé à disposition dans les chambres. C’est le type de tout petit détail qui fait toute la différence. Je propose désormais des tentes à la location : je me suis aperçue que beaucoup de gens avaient envie de tester le camping mais ne possédaient pas de matériel. J’ai aussi été aidée pour rédiger le descriptif de mon offre sur internet, fixer le juste prix pour ma clientèle… »

« La décoration, ce n’est pas mon métier »


A Béthune, dans le Nord, Sophie Krzyzak a racheté une ancienne caserne de pompiers à l’abandon pour en faire un hôtel de charme : « J’ai bénéficié de l’aide d’un architecte d’intérieur pour la décoration des chambres, ce qui m’a permis un gain de temps phénoménal. Seule, je ne savais pas par où commencer ! Ce n’est pas mon métier. L’architecte m’a permis de concevoir une décoration qui plaît aux autres et pas uniquement à moi. Mes chambres ont un style original, régional et surtout unique, comme j’en avais rêvé. Je n’ai pas dépensé plus, j’ai dépensé mieux, grâce au réseau et aux idées de ce professionnel. »

 

Des professionnels du tourisme sur le sentier de la guerre

Le vent y souffle tout autant… Et pourtant, les chiffres ne sont pas vraiement les mêmes. Sur le littoral belge, le tourisme génère quelque 41 000 emplois. Avec 2 000 emplois, les stations balnéaires du Dunkerquois arrivent loin derrière. Autant dire que les marges de progression sont importantes et les perspectives immenses pour le littoral le plus septentrional de France.

Elus et professionnels du secteur y croient dur comme fer : le Dunkerquois a tous les atouts pour devenir une destination touristique : une histoire et une identité forte, d’immenses plages de sable fin, une nature préservée… La sortie du prochain film de Christopher Nolan devrait accélérer considérablement le mouvement : intitulé « Dunkirk », le blockbuster, qui sortira en juillet 2017, devrait conférer une visibilité sans égale au territoire. Les grandes manœuvres sont lancées.

L'autrice

Journaliste spécialisée dans les questions urbaines et les enjeux d'aménagement des villes de demain, Vanessa Delevoye est la rédactrice-en-chef d'Urbis le Mag.