Portrait de territoire : Dunkerque 2/9

Identité
Lundi 23 mars 2015




Nul doute qu’il est peu de régions en France où le travail et l’effort physique sont à ce point valorisés. Sur ce territoire où il a fallu conquérir la terre sur l’eau, où les hommes n’ont eu de cesse de se battre contre les envahisseurs, le héros est un corsaire.

Un territoire aux accents virils

Cela signifie beaucoup. Et notamment que la rudesse, la résistance à l’effort ou à la douleur, qui ont longtemps été des qualités permettant la survie, sont aujourd’hui fortement intégrés à la culture et aux manières d’être.

Les industriels ne se sont pas trompés en investissant le littoral : ils y ont trouvé des hommes et des femmes durs à la tâche, qui n’économisent pas leurs efforts et déploient une immense énergie pour tout faire « à fond ».

Une foule d’éléments prouvent que la rudesse est profondément ancrée dans les modes de vie actuels.

Ainsi, faire carnaval nécessite de mettre de côté sa délicatesse : on est fier d’être parmi les costauds de la première ligne et des chahuts, on y mêle sa sueur sans faire de façons.

Pas de sieste !

La population du territoire a aussi conservé l’habitude de prendre soin d’elle… à dose homéopathique : ne se rend-t-on pas chez le médecin en dernier ressort, lorsque la douleur nous y contraint ?

Les habitants du Dunkerquois, lorsqu’ils ne travaillent pas, s’investissent massivement dans les associations ou les activités sportives : ne rien faire ou pire, faire la sieste, n’est pas bien vu !

Dans un autre registre, alcool et cigarettes sont massivement consommés, comme le prouvent le nombre de maladies associées à ces comportements. Et « tenir l’alcool » conserve une surprenante connotation positive, malgré une évolution progressive des mentalités.

Architecture massive

Viril, vous avez dit viril ? C’est vrai que le territoire cultive des valeurs que, dans les clichés, l’on qualifie volontiers de masculines. A la différence près qu’ici, femmes et hommes partagent cette culture avec la même ferveur.

Les réalisations architecturales, particulièrement massives, voire un peu lourdes, sont appréciées à ce titre. Et dans les aménagements, l’utile est encore souvent préféré au beau…

Quelle est la véritable personnalité de la région Flandre-Dunkerque ?

Pour le savoir, l’agence d’urbanisme de Dunkerque (AGUR) a mené une grande étude en 2006. Tous les documents, articles et livres mentionnant le territoire ont été compulsés. Un groupe ressource d’experts locaux a été créé. Des enquêtes ont été menées auprès d’habitants et de visiteurs (plus de 300 au total). Au final, un rapport de 400 pages croisant tous ces regards a été rédigé. Dix traits de caractère, tant physiques que psychologiques, ont finalement émergé, comme pour une personne de chair et de sang.

Presque 10 ans après, force est de constater que ce portrait de territoire n’a pas été utilisé par les différents acteurs du Dunkerquois (élus, professionnels du tourisme ou de l’économie de l’époque).

Mais il n’est pas trop tard ! L’expérience actuellement menée dans les villes autour du Louvre-Lens le démontre : un portrait de territoire est un outil précieux d’aide à la décision. Il contribue à donner du sens à des produits économiques, touristiques ou culturels ; à construire des événements en adéquation avec les spécificités physiques et culturelles du territoire ; à déterminer des stratégies de développement...

Des hommes (et des femmes !) durs à la tâche

L'autrice

Journaliste spécialisée dans les questions urbaines et les enjeux d'aménagement des villes de demain, Vanessa Delevoye est la rédactrice-en-chef d'Urbis le Mag.